Entre ombre et lumière

[Premier post]

Assis sur un tabouret devant la coiffeuse à la peinture écaillée, Yuuhiel soupira. Les néons de la pièce, renvoyés dans le grand miroir, lui hachaient le visage. Ses cheveux tombaient le long de ses joues comme des plaques d'acier. Il les rejeta en arrière ; la blancheur de sa peau dévoila son éclat.

La porte s'ouvrit violement et une sombre silhouette apparut derrière lui.

-"Yu, t'as été époustouflant ce soir ! Toutes les places pour la prochaine représentation de "La Robe Déchirée du Dieu" ont été vendues !"

Le jeune homme ne réagit pas, s'attachant à passer du coton humide sur ses lèvres grasses de rouge. L'autre posa les mains sur ses épaules et se pencha vers lui pour lui murmurer à l'oreille :

-"Depuis tout petit, tu possèdes ce talent de théâtre... Cependant, ici c'est un cabaret, et je ne pensais pas que tu tiendrais le public en ne restant que sur la scène et ne leur permettant jamais de venir dans ta loge... Comment fais-tu pour les envoûter à ce point ?"

Un mince sourire étira la bouche charnues de Yuuhiel.

-"Il suffit de montrer à chacun son fantasme, l'esquisse de ses rêves les plus fous..." murmura-t-il.

-"Hein ? Tu as dis quelque chose ?"

L'homme lui saisit le menton et Yuuhie leva vers lui ses yeux profonds aux cils chargés de poudre blanche comme une toile d'araignée constellée de flocons.

-"Je veux te garder pour toujours, Yu..." fit-il l'air grave.

La phrase résonna en Yuuhiel comme un refrain familier. Il ferma les yeux et se détourna.

Pardon, Hiroshi... Je ne peux que susciter les désirs, mais jamais les exaucer.

La nuit commençait à tomber, les lampadaires s’allumèrent peu à peu éclairant les rues de leur lumière blafarde. Mazoku accéléra le pas, le spectacle avait certainement commencé et il avait envie de voir au moins la fin … histoire de voir ce que ce nouveau dieu donnait sur la scène du Cabaret.

Au départ il avait ronchonné lorsqu’on l’avait chargé de ramener de la cité un jeune homme qui ne savait même pas qu’il était un Dieu … puis il avait appris qu’il travaillait actuellement au Cabaret … donc il s’était adouci.
Et enfin on lui avait dit qu’il s’agissait du Dieu de la tentation … et étrangement Mazoku avait cessé de grogner et était devenu bien plus coopératif.

Les talons plats de ses hautes bottes claquèrent sur les pavés qui recouvraient encore certaines rues du centre-ville. A nouveau, il n’avait pas vraiment fait dans la discrétion en ce qui concernait sa tenue et bon nombre de visages curieux se retournaient sur son passage.

Il faut dire que ses hautes bottes en cuir noir s’arrêtaient peu au-dessus de ses genoux dévoilant une bonne partie de ses cuisses … son court short en jean ne cachant pas grand-chose. Il était aussi en partie masqué par l’ample pull qu’il portait et qui dévoilait l’une de ses épaules laissant entrevoir le débardeur en mailles qu’il avait en dessous.
Il avait attachés ses cheveux et on pouvait apercevoir quelques épingles qui maintenaient plusieurs mèches ici et là.

Il arriva finalement devant la grande façade du Cabaret et son regard se perdit un instant parmi les nombreuses lumières qui s’y mêlaient.
Ça faisait un bout de temps qu’il n’y avait pas mis les pieds …

Il baissa finalement les yeux oubliant les nombreux partenaires qu’il y avait trouvés et se dirigea vers le guichet. On lui apprit que le spectacle se terminait dans une courte demi-heure et après une rapide négociation Mazoku pénétra dans le Cabaret.
Ses pas le guidèrent sans le tromper jusqu’à la salle où se tenait la représentation et le jeune Dieu de la luxure s’adossa au fond de la salle son regard se portant sur le personnage principal qui se mouvait avec élégance sur scène.

De légers frissons prémices d’un désir évident parcoururent progressivement son corps, son regard s’assombrit légèrement et un fin sourire étira les lèvres de la Luxure.
… Ce jeune homme était véritablement l’incarnation de la Tentation.

Les lumières s’intensifièrent soudainement dans la salle alors que le spectacle prenait fin, les acteurs saluant leur public avant de disparaître derrière un ample rideau rouge. Mazoku se mordit un instant la lèvre suivant des yeux le corps fin de l’acteur principal.
Cette mission s’annonçait plus que plaisante…

Sortant de la salle, il ne suivit pas la majeure partie de la foule qui prenait la direction de la sortie mais il dirigea vers la partie secondaire du Cabaret … celle qui donnait l’accès aux loges.

On lui apprit que l’acteur principal n’acceptait aucune visite dans la sienne et ce n’est qu’après quelques minutes de persuasion digne du Dieu de la Luxure que le jeune homme obtint le nombre de la loge qu’occupait l’objet de ses désirs et accessoirement l’objet de sa mission.

Le jeune dieu n’eut pas grand mal à trouver la porte qui l’intéressait et ne prenant pas la peine de frapper il pénétra silencieusement dans la loge. Il fit quelques pas dans la pièce et il aperçut l’objet de ses désirs qui se détournait d’un second homme ses lèvres démaquillées laissant passer quelques paroles.
Les lèvres de la Luxure s’étirèrent et lentement il se rapprocha des deux garçons. Il ne prêta aucune attention à celui qui venait de se faire rembarrer et en passant à proximité du jeune dieu, Mazoku se pencha à sa hauteur pour lui dire quelques mots sur le ton du secret.

« Il ne faut jamais dire jamais »

La Luxure se redressa et s’arrêta contre un mur à quelques mètres de la Tentation. Daignant enfin porter son attention sur le troisième homme, Mazoku lui jeta un regard teinté d’indifférence et s’adressa à lui sur un ton assez suffisant.

« Si tu le permets, j’ai à parler avec Yuuhiel (esquisse de brefs gestes de la main qui désignait la porte de la loge) … Donc si tu veux bien nous laisser »

Dans le miroir, Yuuhiel vit la porte s'ouvrir sur un jeune homme à la lumineuse chevelure. Il se retourna, perplexe.

Quand l'inconnu s'approcha pour lui parler, le jeune homme tressaillit. Comment avait-on pu lire dans ses pensées ? Ce n'était pas... humain...

Hiroshi toisa durement le nouveau venu, mais il eut à peine le temps d'ouvrir la bouche que ce dernier l'écartait déjà avec autorité.

Yuuhiel haussa les sourcils d'étonnement, puis évalua avec curiosité le degré de rouge qui montait aux joues d'Hiroshi.

-"Pour qui vous prenez-vous ?" grommela l'homme en serrant les poings, "C'est ici une loge privée !"

Yuuhiel n'avait jamais encore vu Hiroshi dans un tel courroux. Il trouva cela très amusant et épia la suite avec intérêt. Qui était donc ce jeune homme blond ? Que lui voulait-il ?

-"Comment connaissez-vous mon nom ?"

Yuuhiel tressaillit en entendant les quelques paroles que le jeune dieu de la Luxure lui chuchota au passage.
Il n’avait pas parlé à voix haute ?

Ce fut au tour de Mazoku d’être brièvement étonné mais rapidement ses yeux se mirent à pétiller. Il est vrai que le jeune homme ne savait pas qu’il était un dieu … il n’avait donc pas conscience de ses pouvoirs !
C’était très bien pour la Luxure ça !
Ça signifiait qu’il ne lui interdisait pas l’accès à ses pensées, contrairement aux autres dieux qui s’était rapidement méfié de « l’innocent » Mazoku.

La Luxure fut néanmoins interrompue dans ses pensées jubilatoires par l’autre garçon qui se trouvait dans la loge.
Il n’était toujours pas parti celui-là ?!
Il le regarda serrer les poings et grommeler le rouge aux joues. S’ils avaient été seuls et qu’il n’était pas en mission, Mazoku se serait fait une joie de le faire rougir et serrer les poings pour une autre raison.

Mais bon ils n’étaient pas seuls et Yuuhiel était bien plus intéressant.
C’était mignon de le voir s’énerver de cette manière mais pour le moment ça contrariait le jeune dieu plutôt qu’autre chose. Mazuko était du genre gamin gâté et il n’aimait pas qu’on lui désobéisse ... sauf lorsqu’il s’agissait d’un autre dieu.
Il haussa donc un fin sourcil face à ses grommellements.

« Je me prends simplement pour ce que je suis. Je me fiche bien de savoir que cette loge soit privée ou non, j’ai à parler avec Yuuhiel … (sourit légèrement) et ta présence n’est pas nécessaire »

Il s’écarta du mur et se rapprocha du gêneur ses talons plats claquant de nouveau sur le sol. Il saisissait doucement mais fermement par l’épaule il lui fit faire demi-tour et posant sa main sur son postérieur … agréable au toucher il fallait bien l’avouer … Mazoku le poussa en direction de la sortie.

« Sors donc d’ici … je n’aime pas me répéter »

Son sourire se fit carnassier et son regard s’assombrit légèrement alors qu’il le fixait intensément … le dieu de la Luxure était rarement doux qu’on se mettait entre lui et l’objet de ses désirs.
Il faut dire que son dernier amant était l’un des pires sadiques qu’il y avait aux cieux.

Son visage s’adoucit néanmoins lorsque la voix douce du jeune acteur se fit entendre derrière lui. Se contentant de tourner son visage vers le garçon, Mazoku esquissa un fin sourire alors que son regard coulait sur son visage maquillé.

« Les explications viendront tout à l’heure … je serais tout à toi lorsque je me serais débarrassé de ce fâcheux contretemps »

L'attitude du nouvel arrivant à l'égard de Hiroshi destabilisa Yuuhiel. Un coup il le menaçait, un coup il le caressait. Que signifiait ceci ? Etrange tentative d'intimidation, il fallait l'avouer. Etrange mais efficace : Hiroshi cessa aussitôt de protester et se laissa conduire hors de la loge.

Il jeta cependant un dernier regard désemparé à Yuuhiel avant que la porte ne se referme sur lui. Le jeune acteur détourna les yeux. Depuis des années, Hiroshi venait près de lui en espérant quelque chose. Et depuis des années, Yuuhiel lui tournait le dos pour lui faire comprendre qu'il n'y avait absolument rien à espérer de lui.

Hiroshi n'était pas le seul à qui il avait sans cesse refusé des avances, mais c'était le seul qui continuait de s'accrocher à lui. Certains avaient fait une dépression ou bien s'étaient suicidés, d'autres avaient quitté la ville... Rares étaient ceux qui persistaient à souffrir à ses côtés.
Hiroshi avait assisté à chacune de ses représentations, l'avait rejoint chaque soir dans sa loge, et s'était vu tout le temps rejeter. Malgré tout, il persistait à le porter en adoration, à l'inverse des autres qui l'avaient maudit, traité de fléau, tenté même parfois de le blesser afin de détruire ce désir qui les dévorait.

Cela surprit donc un peu Yuuhiel que le fidèle et passionné Hiroshi s'écrase devant le premier venu. Mais en même temps, cela le soulageait : la constante présence d'Hiroshi l'avait poussé à éprouver un léger manque quand celui-ci était absent. Il fallait réparer cela en lui refusant désormais l'entrée de sa loge !

Une fois qu'ils furent seuls dans la pièce, Yuuhiel ne prêta pas d'attention à l'inconnu et entreprit de défaire ses longues boucles d'oreille en perles de quartz.

L’empêcheur de tourner en rond fut mis à la porte sans trop de difficultés.
Est-ce que la main sur son postérieur ou la menace sous-entendue dans sa voix qui le rendit si docile ?
Mazoku n’en avait pas la moindre idée et cela ne l’intéressait pas vraiment, le principal était qu’il se trouvait enfin seul à seul avec le jeune acteur.

Il ferma, sans aucun ressentiment, la porte au nez du pseudo cocker et pivota sur ses talons pour se retrouver en direction d’Yuuhiel.
Le jeune dieu l’ignora superbement enlevant soigneusement les lourdes boucles d’oreille qu’il portait.
Mazoku ne se démonta pas … au contraire en voyant que le visage calme du dieu de la Tentation ne se tournait pas vers lui, il sentit l’adrénaline augmenter tout doucement dans ses veines.

Le jeu ne faisait que commencer.

La Luxure vint se placer derrière Yuuhiel, il ne le toucha … même si ce n’était pas l’envie qui lui manquait … et se contenta de pencher légèrement le haut de son corps sur le côté l’observant à travers le miroir.
La large encolure de son pull glissa un peu plus le long de son bras dévoilant une plus grande partie de son épaule et masquant entièrement l’une de ses mains aux ongles longs.

« Pour répondre à ta question de tout à l’heure, je te dirais simplement qu’il n’y a pas que dans ce Cabaret que certaines personnes ont les yeux sur toi »

Même s’il ne le touchait pas, Mazoku restait proche du jeune acteur laissant son souffle caresser la base de son cou. Néanmoins, la poudre l’empêchait de capter l’odeur du jeune homme ce qui le frustra un peu mais il parvint à se contrôler s’empêchant d’enfouir son nez dans son cou … sachant que s’il commençait à suivre ses pensées, il risquait de rapidement braqué Yuuhiel.

« Tu as attiré notre attention … et je suis chargé de te ramener parmi nous (marque une courte pause et ancre son regard dans celui de l’acteur à travers le miroir) Tu vois mieux qui je suis ? »

Voilà que l'inconnu s'était rapproché de lui pour se placer juste derrière son dos. Même sans le regarder, Yuuhiel avait dans son champ de vision l'épaule dénudée et le sourire engageant de l'homme.

Que voulait-il signifier par "pas que dans ce cabaret" ? Evidement, que peu de ses admirateurs y logeaient ! Certains venaient même d'autres villes pour le voir. Yuuhiel ne comprenait pas où il voulait en venir.

Le souffle chaud de l'inconnu sur sa nuque nue le fit émerger de ses pensées. Yuhhiel soupira d'exaspération. Les avances commençaient !

Il n'avait jamais vu ce type auparavant dans le public, ni nulle part ailleurs. Et celui-ci avouait qu'il avait attiré "leur" attention. Donc ils étaient plusieurs. Peut-être un réseau de soupirants ? Une secte recruteuse de jeunes et beaux mâles pour les offrir en sacrifice à des dieux tabous ?

Alimentée par la littérature épique dont il raffolait, son imagination pouvait parcourir des kilomètres.

Offert en sacrifice...
Un discret sourire tordu déchira la cire de son visage.
Oui, il se voyait bien incarner un martyre. Il faudrait qu'il demande à Hiroshi de lui écrire une pièce sur ce thème.

La respiration régulière de l'inconnu sur sa peau... Y étant attentif, Yuuhiel savait exactement quand l'expiration allait le toucher. C'est pourquoi il ne frémissait pas. Il ferma les yeux, imaginant ceux de l'homme guettant les lueurs de la poudre sur sa chair. Imaginant son désir sans parvenir à le cerner. Car Yuuhiel ignorait tout de la sensation du désir, il ne faisait que le spéculer d'après ce qu'il observait comme réaction chez autrui.

-"Pardonnez-moi... Je ne sais pas qui vous êtes. Je ne comprend rien."

Ignorant tout de cet homme, il ne pouvait profiter du désir qu'il faisait naître car il ne parvenait tout simplement pas à deviner quel rêve son interlocuteur voyait en lui.

Alors, brusquement, il se retourna pour planter son regard glacé de serpent dans les prunelles vertes félines de l'inconnu. Et il tint ce regard, pour tenter de deviner ses pensées.

Les paroles de l'inconnu semblèrent faire écho en Yuuhiel. Il écarquilla les yeux de surprise, bouche bée. Cet homme venait-il de se moquer de lui pour se venger d'être ignoré ? Que signifiait son perpétuel sourire bizarre ?

Après cette furtive irritation, l'information s'intégra plus profondément dans son esprit. Dieu... oui, ce mot paraissait expliquer bien des choses... En particulier cette faculté qu'il possédait depuis toujours, celle dont il n'avait parlé à personne, pas même Hiroshi. Comme ce jour-là, quand un client ayant trop bu avait voulu l'entraîner dans un coin alors qu'il avait à peine une dizaine d'années... Ce jour-là, Yuuhiel l'avait fixé longuement, concentrant toute son adrénaline de terreur dans un regard, et... l'homme était devenu un caillou. Oui, un caillou tout dur, tout plat, avec lequel Yuuhiel avait fait un ricochet de trois bonds sur le lac du Parc. Ensuite, des rumeurs avaient couru comme quoi Tôma, surnommé "l'ivrogne", avait été retrouvé, flottant au bord d'une rive, à l'état de cadavre. Une noyade due à l'excès d'alcool, disait-on. Le jeune Yuuhiel en avait fait des cauchemars, puis avait soigneusement rangé ce souvenir encombrant dans la case de sa tête prévue à cet effet : l'oubli.

Il y avait eu encore quelques expériences comme cela ; par exemple, ce chien qui lui vola son poulet frit et qu'il avait poursuivi... Brusquement, l'animal s'était transformé en cuisse de poulet. Prudent, Yuuhiel s'était bien gardé manger et le cacha dans un buisson pour voir ce qu'il allait en advenir. Des fourmis commencèrent à le dévorer. Quand la cuisse de poulet redevint chien, ce fut pour émettre un cri de douleur et de s'enfuir en courant, à demi-entamé par les insectes. Dégoûté, Yuuhiel s'enfuit et alla pleurer dans sa loge.

Depuis, le jeune acteur avait tout tenté pour contrôler ses pensées lorsqu'il se fâchait, en vain. Ce don malheureux persistait à faire souffri autrui, comme s'il fallait absolument que les choses et les êtres fussent punis de l'action qui lui avait déplu. Sur le coup de la colère, tous les humains pensent des choses affreuses, mais les voir se réaliser avaient choqué Yuuhiel. Il avait fini par songer... qu'il n'était pas humain...

Il baissa la tête, désireux de chasser ces souvenirs sombres et cette idée ahurissante.

-"Hiroshi avait raison..." marmonna-t-il, Pour qui vous prenez-vous, à débarquer comme ça pour m'inventer des salades ? Je sais parfaitement me débrouiller dans mon théâtre, pour ce qui est de l'imagination, merci !"

Sourcils froncés, il s'éloigna de lui, défit sa ceinture, les boutons de sa tunique, et allait la faire glisser de ses épaules lorsqu'il constata que le fou imprévu était toujours dans la pièce.

-"Pouvez-vous sortir, s'il vous plaît ? J'aimerai me changer tranquillement."

Souhaitant connaître l’impact de ses paroles, Mazoku se laissa de nouveau aller plongeant une fois de plus dans l’esprit du jeune acteur.
Certaines personnes avec un peu plus de retenue n’auraient pas osé violer ainsi la vie privée d’un autre … mais le problème était que la Luxure n’avait aucune retenue, aucune notion de la vie privée. Il était comme un garçon à qui on n’avait pas appris les bonnes manières. Il savait bien se tenir pour certaines choses … mais certainement pas pour d’autres.

Il découvrit donc certains souvenirs d’Yuuhiel alors qu’il se les remémorait.
Il n’était donc pas tromper il s’agissait bien du Dieu qu’’ils recherchaient … Ses souvenirs étaient assez impressionnants et n’ayant pris conscience de la présence d’Yuuhiel que dans la précédente réunion avec les autres dieux, Mazoku ne l’avait jamais observé. Il ne connaissait donc pas les pouvoirs qu’il avait et à vrai dire c’était assez … impressionnant.
C’était comme s’il était capable de transformer les êtres vivants en quelque chose de matériel.

Sur ce coup-là, Mazoku était bien heureux d’être un dieu et donc de pouvoir se protéger des pouvoirs des autres divinités.

Mais apparemment Yuuhiel n’était pas prêt à accepter ses pouvoirs, il sembla les nier en bloc … tout comme son statut de dieu.
Manque de chance pour lui, Mazoku pouvait se révéler être du genre à ne pas lâcher le morceau … surtout lorsqu’il le voyait en train de commencer à se déshabiller devant lui. Ses marmonnements lui passèrent carrément au-dessus de la tête.

Heureusement pour le jeune acteur, la Luxure avait appris à contrôler un minimum ses hormones sinon le pauvre garçon aurait rapidement gagné une aide pour se dévêtir.
Avisant un petit coin de libre sur un meuble proche, le jeune dieu s’assit dessus croisant ses longues jambes et s’appuya sur l’une de ses mains la posant derrière lui.

« Ne t’en fais pas je ne suis pas dérangeant »

Ça il n’y avait rien de moins sûr …

« Si je sors tu ne me laisseras pas rentrer de nouveau (lève sa seconde main en signe d’impuissance) Donc je suis obligé de rester. Et puis ne crois pas que je vais te laisser nier tranquillement ta véritable nature. Tu n’as pas le choix tu dois accepter le fait que tu sois l’un des nôtres, ne t’en fais pas malgré les rumeurs qui circulent parmi les humains, nous ne sommes pas bien méchants »

L'inconnu s'imposait sans scrupule, d'ailleurs avec un culot assez déroutant. Yuuhiel sentit l'agacement le gagner peu à peu et s'empressa de penser à autre chose pour se contrôler. Qu'est-ce qui se passerait si cette personne se transformait subitement en... en rouge à lèvre, par exemple, et que dans son courroux le jeune acteur l'écrasait sur ses lèvres, ou sous son pied..?

La tunique tomba de ses épaules, dévoilant son buste nacré. Il ramena ses cheveux couleur argent d'un seul côté, tout en épiant l'homme dans le miroir. Jusqu'à quand celui-ci se retiendrait-il ? Yuuhiel était à la fois intrigué et effrayé de le savoir. Mais le plaisir de se sentir désirer, de faire converger tous les regards et toutes les pensées sur sa personne, rien que cela le poussait à se déshabiller lentement devant quelqu'un dont il ignorait l'identité. Il se savourait lui-même reflété dans les yeux d'autrui.

-"Faites ou dites ce que vous voulez, je m'en moque."

Pas méchants, lui et sa secte ? Comment en être certain, d'après sa persistance à rester ? De toute façon, ni lui ni personne ne l'obligerait à quoi que ce soit, surtout pas à quitter sa loge, son théâtre, pour rejoindre des huluberlus sans nom.

-"Mais sachez que je peux appeler mes supérieurs si vous n'en faites qu'à votre tête."

Il forçait sa voix suave à employer le ton de la menace et se doutait bien que ça n'était pas très crédible. L'intimidation par la force ne constituait pas son atout.

Devant la pose nonchalente et culottée de l'individu, Yuuhiel serra les poings. Il n'aimait pas être l'objet de moquerie. Il préférait voir des visages ébahis sur son passage. Il allait répliquer quelque chose de cinglant soigneusement préparé lorsque soudain, son expression changea radicalement.
Ses joues passèrent du blême au rouge. Il cessa de s'adressr à l'inconnu par miroir interposé et fit volte face pour le fixer durement.

-"Co... comment êtes-vous au courant ?"

Apparement, cette secte l'épiait depuis des années ! Savait-elle tout à son sujet ? Yuuhiel ne put réprimer un frisson. Il s'empara d'un châle argenté et s'en couvrit les épaules.

-"De toute façon, vous n'avez aucune preuve... Vous n'arriverez pas à me faire du chantage... Je resterai ici, que cela vous plaise ou non !"

Il était bien décidé à ne pas se laisser faire. Beaucoup de gens avaient tenté de l'avoir par la force ou la ruse, mais il en avait toujours réchappé. Alimenter les fantasmes, d'accord, mais jamais il ne tomberait entre les bras de personne. Jamais, jamais, jamais.

Il fronça les sourcils pour concentrer son attention sur l'homme aux cheveux dorés.

-"C'est pour vous que c'est dangereux, si vous restez ici. Je vais vous changer en quelque chose de bien friable !"

Son étrange pouvoir lui était fort utile pour se débarrasser des opportuns. Mais cette fois, il le désirait vraiment, pas seulement au fond de lui. Cette fois, il allait transformer quelqu'un en étant parfaitement conscient de son acte. Un mince sourire se dessina sur ses lèvres.

Yuuhiel perdit son sourire lorsque l'individu lui répéta ce qu'il n'arrivait pas à admettre. Un Dieu... Etait-ce possible ? Bien-sûr, Yuuhiel s'était étonné de ne jamais en avoir reçu la visite. Beaucoup de gens l'interrogeaient avec un air goûlu s'il était uke ou seme. Comme il n'avait pas eu l'air de comprendre, ils lui avaient demandé si un Dieu était venu le voir, dans son enfance. Yuuhiel ne se souvenait de rien. Mais maintenant, alors qu'il était devenu adulte, un Dieu se présentait à lui. Pour lui indiquer que sa place était au Ciel.

Le jeune homme secoua lentement la tête. Il n'aimait pas s'embrouiller avec des réflexions. Il préférait jouer la comédie. Oui, le théâtre recellait moins de complications. On attendait quelque chose de précis de sa part. Mais cette vie aux Cieux que l'inconnu lui faisait miroiter...

-"Je n'ai pas envie de partir... Ma vie dans ce théâtre est tout pour moi. De toute façon, vous vous êtes passés de moi durant tant d'années... C'est ici que l'on a besoin de mes talents."

En réalité, il avait peur. On voulait l'amener dans un lieu inconnu, improbable. Il ne savait s'il pouvait faire confiance à cette personne...

Il avisa sa loge et releva ensuite les yeux sur son interlocuteur.

-"Et où vivrais-je, si vous m'emmenez là-bas..? Qu'est-ce que j'y ferais..?"

Il savait bien que rester ici était dangereux pour les gens. Accepter l'idée d'être un Dieu, cela revenait à accepter de leur faire du mal pour un rien. Mais sans doute, avec un apprentissage, arriverait-il à se contrôler..?

-"Comment... avez-vous appris à contrôler vos pouvoirs, vous..? Et quels sont-ils, au juste ?"

La réaction première d’Yuuhiel face aux révélations fut de refuser de quitter le théâtre … mais bon il y avait tout de même une légère amélioration … au moins il ne niait plus sa véritable nature. C’était déjà ça.

Mais Mazoku ne comprit pas très bien ce refus, cette réticence à quitter l’endroit qui vous avait vu grandir. Le Dieu de la Luxure n’attachait pas d’importance à ce genre de choses, il n’avait eu d’objets fétiches ou d’endroits où il se sentait réellement bien. Généralement il avait toujours ce qu’il voulait et cela n’avait fait que renforcer son caractère d’enfant pourri gâté.
Pourtant son père ne l’avait jamais couvert de cadeaux au contraire il était plutôt strict et lui avais refusé beaucoup de choses … pour qu’il ne devienne pas comme ça.

Mais le statut de Dieu était certainement monté à la tête du jeune Mazoku qui s’était très bien fait à l’idée d’être « au-dessus » des hommes de la cité.
A présent bien qu’il ait grandi, il n’avait pas vraiment gagné en maturité, il avait compris que tout ne lui était pas dû mais il continuait de se comporter d’une manière un peu princière.

Sentant qu’Yuuhiel était troublé, il ne dit rien et le laissa continuer. En se taisant, il le laissait réfléchir le faisant douter…
Ça marcha puisque rapidement Yuuhiel se mit à lui poser des questions … comme si l’idée de quitter le théâtre s’imposait progressivement dans sa tête. Le jeune dieu finit par répondre à ces questions, impatient de quitter cet endroit en compagnie de la Tentation.

« Chaque dieu possède sa tour, la tienne n’est pas en construite, tu logeras chez moi en attendant que la tienne soit faîte selon tes goûts »

A vrai dire, ils n’en avaient pas vraiment parlé lors de la réunion … mais vu que c’était lui qui s’était déplacé, il se permettait d’organiser les choses comme ça l’arrangeait.
Et bon ce n’était pas comme s’il considérait la présence de la Tentation dans sa demeure comme une gêne.

« Pour ce qui est de ta fonction, tu te joindras à nous lors des réunions mais si tu le souhaites tu pourrais occuper le poste qu’avais ton père en tant que messager des dieux »

Peu à peu il pouvait sentir grandir l’intérêt du jeune homme et étonnement c’est avec patience et un minimum de sérieux que Mazoku continua de répondre aux questions de son vis-à-vis.

« Chaque dieu apprend à découvrir puis à contrôler leur pouvoir depuis leur naissance. Il te suffira de t’entraîner pour contrôler le tien, c’est ce que j’ai fait … »

Continuant de parler, il se rapprocha encore de l’acteur jusqu’à se trouver tout près de lui.

« Ça m’a pris du temps … (parle un peu plus doucement) Après tout, ce n’est pas toujours facile d’entrer là-dedans »

Il ponctua ses dernières paroles du très brève caresse du bout des doigts sur la tempe de la Tentation. Il retira ensuite sa main un grand sourire plaqué sur ses lèvres.

« Tu es rassuré maintenant ?! »

La curiosité constituait chez Yuuhiel un très vilain défaut. Les simples mots "tu logeras chez moi", "tu te joindras à nous lors des réunions", messager des dieux" suffisaient à éveiller son désir de connaître cet endroit dont parlait l'individu avec un air si confiant. Et puis... on semblait l'attendre. Sans définir exactement pourquoi, le jeune dieu trouvait cette idée agréable.

-"J'y vais juste pour voir, alors..." marmonna-t-il, "Je ne resterai pas longtemps..."

Oui, de toute façon il ne risquait rien. Si c'était du bluff, il punirait l'énergumène en le transformant en quelque chose de bien humiliant. Et si c'était vrai... il verrait bien. L'improvisation faisait partie de ses atouts !

Il alla ouvrir une armoire, fouiller dans la penderie pour en sortir une tunique pourpre et or qu'il revêtit rapidement, procédant comme son numéro de strip tease tentationel : enlever un habit tout en en mettant un autre, tout en ne dévoilant que le strict minimum de peau. Yuuhiel l'avait mis au point depuis des années, et se plaisait à se changer ainsi devant les gens sans que leur désir de le voir nu soit satisfait.

Il peigna ensuite ses longs cheveux argentés, qu'il noua en catogan avec un ruban assorti à sa tunique. Il chaussa des sandales légères en cuir roux et se pencha devant sa coiffeuse pour se poudrer un peu le visage de couleur nacrée. Enfin, il se tourna vers le prétendu dieu pour lui décocher un sourire narquois.

-"Je suis tout à vous, maintenant..."

Il était prêt à le suivre, ressentant de la crainte et de l'enthousiasme mêlés.

Évidement, Yuuhiel ne put comprendre la blague de l'individu, étant donné que, s'il connaissait le vocabulaire de la tentation, il demeurait étranger à tout ce qui avait trait au "après", c'est à dire la luxure.

Le jeune dieu restait frustré. En effet, cette personne qui ouvrit nonchalament la porte de sa loge pour en sortir comme il en était rentré, cette personne-là était la seule qui parvenait à se contenir aussi longtemps face à lui. Yuuhiel avait l'habitude que les humains se jettent à ses pieds dès qu'ils avaient échangé quelques mots. Cet énergumène ne se rendait-il pas compte de sa beauté ? Etait-il donc insensible ? Si c'était le cas, Yuuhiel le plaignait. Il était persuadé qu'il n'arriverait pas à survivre sans la vision de lui-même chaque jour, alors pour les autre, cela devait être un calvaire, non ?

L'égocentrisme consituait quelque chose de naturel, chez Yuuhiel, comme la couleur de cheveux d'un quidam.

Il emboîta donc le pas à cet étrange inconnu, en constatant d'un ton boudeur :

-"Vous connaissez mon nom, mais je ne connais pas le vôtre..."

À ce moment, Hiroshi arriva d'un pas pressé et s'exclama, apparement paniqué :

-"Yuuhiel ! Où vas-tu ?! Je t'interdis de suivre ce die... cet homme ! Il ne mérite pas ta confiance ! Sais-tu qu'il est connu en ville pour enlever sans scrupule des jeunes hommes ? Ne pars pas avec lui !"

Il vint fermement empoigner le bras de Yuuhiel et fusilla Mazoku du regard.

Mazoku se sentait étrangement bien, son self-control avait porté ses fruits et il était parvenu à sortir de la loge sans n’avoir rien faire de fâcheux au Dieu de la Tentation. Son apparente impassibilité masquait très bien le désir qui s’insinuait sournoisement dans ses veines faisant bouillir son sang.

Et puis il avait réussi à faire naître un sentiment de frustration chez la Tentation … et ça il en était on ne peut plus fier. Cela ne l’empêcha cependant pas de se sentir un peu frustré à son tour lorsqu’Yuuhiel passa près de lui sortant de sa loge, son odeur masculine mélangée à celle de la poudre venant affoler ses sens olfactifs.

Mais le jeune en valait la chandelle.
Hm enfin il avait une mission à remplir … et il ne cracherait certainement pas sur quelques extras.

Le jeune dieu referma la porte de la loge et commença à se diriger vers la sortie se tournant légèrement vers le jeune homme. Il sourit doucement même un peu plus sincèrement face aux bougonnements d’Yuuhiel et qui lui demandait son nom d’une manière détournée.

Mazoku ralentit le pas pour se retrouver au même niveau que la Tentation, il commençait à se pencher vers lui afin de lui dire quelques mots sur le ton du secret mais une furie fit alors son apparition.
Le garçon saisit Yuuhiel par le bras fusillant la Luxure du regard en essayant de dissuader le dieu de le suivre.

Apparemment il avait sous-estimé le pouvoir de la Tentation sur ces faibles humains, celui-ci semblait s’accrocher férocement au jeune homme.
Ça commençait sérieusement à l’énerver, Mazoku n’était pas du genre patient se révélant plutôt impulsif lorsqu’on se dressait sur son chemin.

« Pour qui te prends-tu pour lui interdire de faire quelque chose ? »

En quelques pas, il fut face à l’importun serrant son bras à son tour ses ongles s’enfonçant légèrement dans sa peau pour lui faire lâcher prise. Son regard s’était assombri signe que l’énervement le gagnait.

« Sache que je n’enlève jamais personne … les jeunes hommes je les dévore sur place (serre un peu plus le bras du garçon) Ne rabaisse pas Yuuhiel à ce rang, veux-tu ! (se penche à son oreille) Je ne suis pas bien sûr que tu saches vraiment à qui tu as à faire … ne m’énerve pas ou je serrais bien capable de t’envoyer quelques loups garous »

Il relâcha finalement sans aucune douceur le bras du jeune homme y laissant 5 petites marques bien apparentes. L’énervement avait fait disparaître le Mazoku qui usait de sa sensualité laissant agir la Luxure impulsive qui n’hésitait pas à user des menaces … même si les autres dieux ne l’autoriseraient certainement pas à libérer ne serait-ce qu’un loup dans la cité, surtout si c’était pour le lancer sur un humain.
Il gardait néanmoins son sang-froid se redressant pour porter son regard sur Yuuhiel.

« Tu vas écouter cette sangsue et ne pas me suivre ? »

La réaction de l'individu surprit Yuuhiel. Il n'aurait pas pensé que la colère puisse animer cet homme ! Il en contempla les effets avec intérêt. Ses yeux lançaient de éclairs verts tandis qu'il agrippait Hiroshi de façon autoritaire.

Le jeune dieu s'étonna également que l'inconnu fusse aussi connu des autres que lui. Décidément, il ne sortait jamais de son Théâtre !
Yuuhiel esquissa un sourire cruel devant les marques inscrites sur la chair de l'humain. Il aimait avoir l'impression que l'on se batte pour lui, que l'on se déchire à son sujet. Et avec ces deux fortes personnalités, cela ne paraissait pas bien difficile...

Mais au lieu de se jeter à la gorge de Mazoku, comme l'espérait Yuuhiel, Hiroshi tourna vers ce dernier un regard empli de détresse et d'adoration. Un regard visqueux, écoeurant pour le jeune dieu. Il méprisait cette soumission car elle signifiait que sa beauté rendait faible au lieu de décupler l'énergie et la volonté des gens. C'était vexant !

Il se détourna d'Hiroshi en haussant les épaules, se passant une main dans les cheveux et l'autre s'accrochant à un pan de vêtement de Mazoku.

-"En effet, il est dangereux de suivre un inconnu... Dites-moi votre nom, et c'est avec vous que j'irai."

Hiroshi baissa la tête et commença à sangloter derrière Yuuhiel, frappant le mur de ses poings rageurs.

-"Tu es ignoble, Yuu... Tu deviens de pire en pire... Et pourtant, je ne supporterai pas ton absence... Je vais me suicider, Yuu !"

Yuuhiel feignit de n'avoir rien entendu et continua de s'éloigner dans le couloir.

La frustration fit progressivement place à la satisfaction chez le jeune dieu qu’il accompagnait. Apparemment il n’était pas mécontent que deux hommes s’énervent pour lui. Mazoku aurait pu se contenir, ne pas répondre à la provocation mais il était déjà occupé à contrôler ses hormones résultat son coté impulsif avait pris le dessus et il en était venu à menacer le gêneur.

Il détestait vraiment qu’on se mette sur son chemin.

Ayant reporté son regard sur le dieu de la Tentation, Mazoku put voir l’apparition d’un sourire cruel sur ces lèvres. Cela étonna un peu la Luxure, jusqu’à lors le jeune homme avait fait preuve de suffisance, d’intelligence, d’un peu de vanité et le jeune dieu découvrait à présent un autre trait de son caractère.

Il ne fut ni choqué ni effrayé … après tout il avait eu nombre d’occasions d’observer de tels sourires sur le visage de Kaitaru, ce n’était pas un trait de caractère qui lui faisait peur.
Au contraire ça pouvait être un petit plus.

La vexation se superposa bientôt sur la satisfaction lorsqu’Hiroshi baissa les bras face aux paroles de la Luxure. Apparemment le bel homme n’appréciait pas la faiblesse et il n’hésita pas à se montrer particulièrement cruel dans ses paroles.

Mazoku fut satisfait lorsque ses doigts se refermèrent sur un coin de son pull. Sa présence à ses côtés était des plus agréables et ne prêtant aucune attention aux sanglots de l’importun s’éloignant de lui en compagnie de l’objet de sa mission.

« Je m’appelle Mazoku »

Il manqua d’ajouter qu’il était le dieu de la Luxure mais il préféra garder cette information pour plus tard … après tout il ne lui avait pas demandé.
Ils arrivèrent finalement à l’entrée du Cabaret et Mazoku ouvrit la porte au jeune homme lâchant quelques paroles pour s’assurer de quelque chose.

« Le sort de ce garçon ne t’intéresse pas ? »

Il n’avait aucune envie de faire face aux regrets du jeune dieu après.
Pour sa part, il se fichait totalement que le garçon mette ses paroles à exécution … il regrettait simplement qu’un corps à l’allure si agréable disparaisse, il en aurait bien profité lors d’une de ses virées dans la cité.
Mais bon ce n’était pas les jeunes hommes qui manquaient dans la cité, il n’avait pas trop à se plaindre.

La réponse de l'inconnu attira un sourire satisfait sur les lèvres de Yuuhiel. Mazoku... Une résonnnance claquante qui plut au jeune dieu au nom mielleux.

Ils arrivèrent à l'entrée du Cabaret, et Mazoku ouvrit la porte devant lui, avec cependant un air d'hésitation. Lorsqu'il lui demanda si le sort d'Hiroshi lui importait, Yuuhiel se contenta de lâcher un bref ricanement méprisant.

-"Sa mort aurait une quelconque valeur si elle était pour moi. S'il se suicide, c'est simplement pour fuir la souffrance."

Il déclara cela d'un ton naturel. Cette parole consistait selon lui une évidence.

Il sortit du Cabaret en espérant que quelqu'un les aperçoive et vienne provoquer Mazoku, comme l'avait tenté Hiroshi. Mais personne n'était en vue, tous devaient être occupés par leur sieste. Ce n'est que plus tard, au moment du spectacle du soir, qu'ils remarqueraient son absence. Et quand il reviendrait juste au dernier instant, alors que toute la salle le désirerait ardement, sa gloire serait au maximum.

Du moins, ce scénario était tel qu'il se le représentait, sans prendre en compte les empêchements qui pourraient avoir lieu au Ciel où Mazoku le conduisait.

-"Comment procédez-vous pour faire monter les gens aux Ciel ?" questionna-t-il sans mesurer l'ambiguité de ses mots.

Est-ce qu'ils iraient en volant ? En se téléportant ? Sur un animal enchanté ? Si excité par ces perspectives extraordinaires, Yuuhiel avançait à pas rapides.

Mazoku pencha la tête vers lui, et en même temps que sa réponse Yuuhiel sentit son souffle tiède lui effleurer le lobe. Il ne réagit évidement pas, la Tentation ne cédait pas aux avances d'autrui, ce serait le comble ! Ce qui rendait la peau du jeune dieu naturellement bien moins sensible que celle des autres.

Une dragonne ?! Le visage de Yuuhiel s'illumina de curiosité et d'excitation. Finalement, cette journée serait bonne, s'il pouvait avoir l'occasion de monter sur le dos d'une telle créature !

La traversée de la Cité leur attira des attentions particulières qui ne firent que plaire à Yuuhiel. Il ignorait si son compagnon appréciait cela, car lui aussi semblait faire l'objet d'une multitude de désirs. Mais quoiqu'un brin effrayés, ceux-là... Le jeune dieu ne pouvait en deviner la cause.

-"Non, je suis souvent resté cloîtré... J'aimais mon univers... Les gens étaient trop ennuyeux, au dehors..."

Et puis il avait surtout eu peur de déclencher des catastrophes. Mais cela, il préférait le garder pour lui, se sentant légèrement honteux de ne pas savoir se maîtriser, lui dont rien en dehors de cela ne pouvait ébranler la confiance en lui.

-"Et vous..? Êtes-vous souvent "descendu" sur terre ?"

Si Mazoku s'apprêtait à lui montrer un dragon, cela signifiait que cette histoire de dieux était peut-être vraie. Il commençait donc à lentement accepter cette idée, même brèvement et sans imaginer ce que cela impliquerait par la suite.